Pas toujours facile de passer le cap du deuxième album. D’autant plus quand le premier a révélé le groupe comme une des valeurs sûres de la scène française, séduisant presse et médias à l’unanimité…  Eh bien il semblerait que pour « Mille éclairs », les parisiens de Baden Baden ne se soient pas du tout posés ce genre de questions existentielles… Et bien leur en a pris car cela se ressent dès la première écoute, tant cet album respire la liberté. Celle des compos, aux couleurs définitivement personnelles, ainsi que celle de l’écriture, fluide, élégante et, une première, entièrement dans la langue de Molière.
Un essai transformé pour le trio qui se produit (à cinq) actuellement sur toutes les scènes de France. Nous avons croisés Eric le chanteur et Julien le guitariste quelques jours avant leur concert de décembre à la Cigale ….

L’album est sorti en février dernier, vous avez depuis entamé une grande tournée, comment se passe-t-elle ?
Cool ! On a commencé par faire le chantier des Francos, puis tourner à l’étranger, en Belgique, en Suisse. On a eu aussi l’opportunité de partir en Amérique du sud, en Russie et au Canada. Un super moyen pour se rendre compte de l’impact à l’étranger de nos chansons en français. Notamment en Colombie, on a eu de très beaux échanges. C’était une super expérience. Et depuis, on a lancé cette tournée dans toute la France, les gens sont assez enthousiastes, on est au cœur de cette tournée, on a encore pas mal de dates, une chouette année pour nous.

On dit souvent que le deuxième album est un cap difficile. Vous sentiez-vous attendus et cela vous a-t-il mis une certaine pression ?
Oui certainement mais finalement on a beaucoup évolué et quand on réécoute notre premier album, même si on l’aime beaucoup et que l’on en reste super fier, on s’aperçoit que l’on a beaucoup évolué et que ce n’est plus vraiment ce qu’on a envie de faire aujourd’hui. On ne s’est pas trop posé la question de savoir ce que les gens attendaient, s’ils allaient être déçus ou surpris… On avait juste envie de composer et de ne pas se répéter…

Comment l’avez-vous réalisé ?
On a travaillé beaucoup chez nous, à bricoler avec trois instruments et un ordinateur, on aime bien travailler comme ça, puis lorsqu’on a eu le sentiment d’avoir des chansons abouties, ou tout au moins une idée précise du morceau, on a amené ça en studio. On les a retravaillés là-bas. Ou parfois même on gardait les prises « maison » si elles nous convenaient. On a travaillé sans cahier des charges, on a juste été ou l’inspiration nous menait, à faire des choses qui nous faisait plaisir. Chacun travaillait chez lui, de son côté, puis on s’échangeait des choses, chacun rebondissant sur le travail des autres en le portant plus loin. Certains morceaux sont apparus facilement, d’autres moins. Sur un ou deux ans. Les cinq ou six premiers morceaux sont venus vite, puis on a eu un petit passage à vide, comme un manque d’inspiration, l’impression de se répéter. Alors on a breaké, on en a parlé, on a réfléchi, et on est reparti, et là c’est revenu…
Ça reste un travail collectif, on échange beaucoup, comme si chacun bricolait ou remixait les essais des autres. Pour les faire aboutir. Les morceaux semblent évoluer entre plusieurs vies, entre plusieurs mains. On ne travaille pas du tout en studio, tous ensembles, en prise live pour créer nos titres. Pas de création collective mais des bidouillages partagés. C’est moi qui a la fin fait aboutir tout ça.

Vous chantiez en français et anglais sur le premier album, celui-ci est tout en français. Est-ce un moyen de vous situer dans une tradition de chanson française ?
Oui et non car si on regarde tout ce qu’on a écouté depuis qu’on est plus jeune, il y a beaucoup de musiques anglo-saxonnes. Mais nous aimons le poids des mots en français, des choses qui nous parlent directement. Petit à petit, on a marié les deux, et puis peut être qu’aujourd’hui on est un peu décomplexé par rapport à l’utilisation de la langue française. Peut-être qu’à un moment ça donnait une couleur à nos morceaux qu’on assumait moins. Et qu’aujourd’hui ça nous permet d’être plus précis dans nos textes, car on maitrise mieux cette langue que l’anglais, dans ces détails, dans les sens précis qu’on peut lui donner. Mais on n’a pas réfléchi, ça s’est fait naturellement. On écoute beaucoup de choses, pas forcément des artistes français. On a toujours eu le parti pris de ne pas s’imposer de feuille de route précise, de garder les accidents et envies. Rester instinctifs.

Comment on en vient à collaborer avec quelqu’un comme Barny Barnicott, qui a travaillé avec les Artic Monkeys ou Bombay Bicycle Club ?
Dans un premier temps on a travaillé avec Fred Lefranc avec qui on avait déjà bossé sur le premier. Pour la réalisation et l’enregistrement. Mais on souhaitait vraiment une personne extérieure pour mixer, pour sortir de nos reflexes, se libérer de certains de nos défauts, notre côté parfois un peu maniaque sur plein de détails. Quand on nous a parlé de lui, le fait qu’il ne soit pas français nous plaisait, qu’il n’ait donc pas cette culture « chanson ou rock français », cela nous paraissait être le meilleur regard extérieur possible. C’est ce qui nous intéressait, c’était le postulat de départ. On aimait son gout pour le bricolage, sa capacité à conserver les accidents et les rendre attachants. Donc une fois enregistrée, on lui a envoyé toutes les pistes en Angleterre en lui laissant carte blanche et très peu de directives. Quand on a reçu les mixes, on était un peu perturbés mais c’était le jeu, on a mis plusieurs écoutes parfois à accepter mais on est finalement très contents du résultat…

Qu’est-ce qui vous motive et vous rassemble aujourd’hui dans cette aventure Baden Baden ?
C’est comme un truc qui sort de ventre que tu as envie d’exprimer et tu ne sais pas toujours comment ou pourquoi. C’est monter un projet commun, construire ensemble des choses. Ecrire d’autres albums, faire d’autres tournées, avec des gens avec qui tu te sens bien, des gens passionnés qui ont envie de vivre des choses ensemble, et pour ça on s’est bien trouvé, le groupe mais aussi toutes les personnes qui nous accompagnent en tournée. Envie de vivre encore plus loin cette expérience. De voyager. De vivre des expériences humaines, de rencontrer des gens. De la construction de l’album aux tournées. D’assembler nos petits bouts de chansons et en ressortir de vrais morceaux, à tous.

On ne vous a pas vu sur la tournée à Nantes ! Quand venez-vous ?
Ce serait bien sûr avec plaisir, il faut demander à notre tourneur. On adorerait jouer à Stereolux. Pour les Rockeurs ont du Cœur l’an prochain pourquoi pas…

Propos recueillis par Laurent Charliot