Girls in Hawaii, loin d’être dépassés

Les belges de Girls in Hawaii ont de la bouteille désormais, voilà plus de 15 ans qu’ils montent sur scène. Il y a eu du changement depuis leurs débuts comme le prouve leur dernier opus Nocturne qu’ils ont déjà présenté lors d’une tournée française particulièrement réussie. Ils seront sur la scène d’Acoustic Festival samedi 17 mars aux côtés de Keziah Jones et de Idle Fingers.

 

Parles nous de l’évolution qu’a connue le groupe, de ses débuts il y a une quinzaine d’année à aujourd’hui.

Lionel Vancauwenberghe (co-fondateur du groupe) : Moi et Antoine, l’autre chanteur du groupe, nous avons créé ce groupe dans le début des années 2000. C’est une histoire plutôt banale, on s’est rencontré à l’école, on a fait des maquettes et nos premiers morceaux ont plu assez rapidement. Nous voilà rendu à notre 4ème disque mais entre temps il s’est passé beaucoup de chose ..
Un membre du groupe est décédé en 2010, cela a fait une cassure dans notre histoire. On a essayé de passer à autre chose en ouvrant un nouveau chapitre. Everest est sorti en 2013 et il nous a relancé. Notre musique était un peu plus pop et boisée dans nos débuts, elle est devenue plus sombre et synthétique. Ça nous amène jusqu’à Nocturne qui est le prolongement d’Everest, dans la forme en tout cas. On a été plus loin dans l’électronique.
Il y a eu une véritable évolution en quinze ans de carrière.

Avec cette nouvelle formation, tout a été clair rapidement ?

Il y a toujours des choses que l’on aimerait faire mais c’est généralement plus difficile de les mettre en pratique. On a décidé de davantage se laisser aller, on ne fait plus de grands plans sur la comète. Il y a quelques envies bien-sûr, des choses qui se dessinent comme la présence du synthé. Mais dans la majeure partie du temps, on arrive en studio et on tente des choses, nous ne sommes pas pour autant perdus ou dispersés. Avec le temps, on a appris à canaliser nos envies.

Vous avez enchaîné Everest et Hello Strange. Était-ce un choix de prendre plus de temps pour sortir Nocturne ?

Tout est allé vite pour nous, ce sont les journalistes qui nous rappellent gentiment qu’il s’est écoulé du temps depuis 2014. (rires) Hello Strange était un album acoustique, c’est un peu différent mais on l’a quand même joué en tournée pendant plusieurs mois. Pendant ce temps là, tu n’écris pas, on n’y arrive pas, on préfère se concentrer sur nos live. En rentrant, Antoine et moi avons tout de suite composé des morceaux pour Nocturne. Assez vite, nous en avons eu beaucoup donc on a été en studio, on n’a pas vraiment perdu de temps en fait. Après, notre label et notre groupe fonctionnent à l’ancienne, on suit les étapes les unes après les autres, on prend notre temps. A contre-courant. Aujourd’hui, tu peux poster ton truc sur le web sans passer pas des étapes de promo par exemple.

Pourquoi avoir choisi cette pochette dessinée ? Que représente la nuit pour vous ?

On avait la matière musicale et on a essayé de lui donner un sens global. Après Everest, on ne voulait plus vraiment de thème, partir sur un disque plus musical. On a essayé de trouver une pochette qui illustrait ce qu’on avait fait et on est tombé sur ce dessin de Tom Hammick. C’est seulement après qu’on a nommé notre album. Le titre vient tout droit de l’image. Elle nous évoquait la nuit et ses symboles : le rêve et la solitude que tu peux ressentir lorsque tu t’endors. Au début de la construction du disque, complètement par hasard, on a fait un peu d’hypnose avec Antoine. Ce n’était pas lié à la musique mais c’était chouette. Nos deux expériences étaient vraiment en rapport avec tout ça, le rêve et la nuit. Loin de la fête.

Comment vivez-vous le succès de ce dernier en opus, en France notamment ?

C’est assez fou ! De mieux en mieux à chaque tournée. Il y a à chaque fois un public plus important et les anciens sont restés fidèles. Ce n’est pas simple de trouver un nouveau public au fil des albums. Et on ne fait pas forcément de concessions, on fait toujours la musique que l’on aime. La tournée française était bien remplie alors qu’il n’y a même pas eu de gros single, c’est vraiment cool. On rejoue des anciens morceaux, c’est agréable. C’est assez facile de monter sur scène pour nous, on a de l’expérience maintenant. C’est le moment où on profite tous, on prend un kif.

La scène belge est de plus en plus représentée en France, que ce soit avec le hip hop, les anciens de BRNS, la jeune Angèle, Melanie de Biaso … Que penses-tu de cette récente effervescence ?

C’est clair qu’il y a un gros boom depuis 2-3 ans. D’ici, on remarque surtout la montée en puissance de la scène hip hop avec Roméo Elvis, Damso, Caballero & Jeanjass … C’est plutôt cool car de mon point de vue, on a vécu dans un truc un peu pop-rock intimiste dans le passé. Les groupes belges ont beaucoup suivi ce schéma, le hip hop était présent mais plus discret. Il y a un changement de perspective et c’est génial créativement parlant. Tout le monde en bénéficie.

Avec quel artiste belge aimeriez-vous collaborer ?

On n’y a jamais vraiment réfléchi. J’aime bien ce que fait Damso. Ça ne marcherait pas forcément avec Girls à mon avis mais il y a quelque chose de non consensuel dans ce qu’il fait. J’adore ce côté brut dans le hip hop. On ne retrouve plus ça dans le rock, rien ne choque désormais. Alors que des artistes comme Booba ont ce ce petit plus provoquant. Ce qu’il fait n’est pas lisse.

Qu’as-tu écouté récemment ?

King Gizzard & The Little Wizard, des australiens qui ont sorti 5 albums en un an ! Ça me prend pas mal de temps du coup. Rémi Parson aussi, il est tout jeune, ça ressemble à du vieux Daho. C’est d’ailleurs un peu la mode en France de s’inspirer des 80’s. Et pas mal de hip hop aussi.

Connais-tu la programmation d’Acoustic Festival où vous jouerez le 17 mars ?

Pas du tout ! C’est notre première fois là-bas. Comme nous avons de nombreuses dates, on ne regarde pas trop par peur de se perdre. Après on va se dire : « Oh, il y a tout ça ! Il ne faut pas que je tombe malade ! » (rires) Je découvre jour après jour, le matin en me levant.

Il y aura Brigitte, Pomme, Keziah Jones et Yann Tiersen notamment.

On connaît un petit peu Yann Tiersen, on a passé des bouts de soirée ensemble. Il fait plus partie de notre génération. C’est un super personnage, c’est une figure indépendante. Il fait ce qu’il veut, il est libre créativement, j’adore ça.

Girls in Hawaii – « Nocturne » sorti le 29/09/2017
62TVRecords / LE LABEL – [PIAS]
Samedi 17 mars à 20h à Acoustic Festival au Poiré/vie
acoustic-festival.fr

Propos recueillis par Alban Chainon-Crossouard