Leur album « Les conquêtes » sort ce 1er avril et est vraisemblablement l’un des albums les plus attendus de 2016. Les parisiens de Radio Elvis ont été révélés en 2013 avec leur premier EP et notamment l’engouement des Inrocks. Une caution de qualité en général. Personnellement, je pensais et aurais aimé les voir nominés aux Victoires de la Musique… Il faudra attendre… Peu importe, et peut-être même tant mieux aux vues du triste bilan de l’édition 2016, une occasion pour tous les fans de les garder encore un peu dans leur jardin secret. Et de profiter de leur fabuleuse énergie et créativité sur scène durant cette tournée 2016, ou, le vent dans le dos, ils parcourent la France… Nous avons rencontré Pierre Guénard, le chanteur. Originaire du Poitou, il est monté à Paris en 2009 et visiblement, bien lui en a pris, car la rencontre avec ses nouveaux camarades de jeu semble en émoustiller plus d’un …

Bonjour Pierre ! Aller, pour balayer une bonne fois pour toutes la question, pourquoi Radio Elvis ?
Il n’y a aucune référence à Elvis. C’est une sorte de cadavre exquis. Un accident survenu il y a un peu plus de cinq ans. Deux mots qui, à priori, n’ont rien à voir entre eux mais qui tentent une rencontre et deviennent un nom de scène puis un nom de groupe.

Tu cites Marquis de Sade, Orchestre Rouge dans votre biographie, vous avez également choisi un nom portant celui d’une icône des sixties, un peu déroutant compte tenu de votre âge, non ? Pourquoi cette envie de puiser et afficher ses influences si lointaines aux yeux de votre public ?
Je crois qu’Elvis ou plutôt la légende qui accompagne Elvis dépasse les décennies et puis les années 80 sont encore bien présentes il me semble. Il suffit d’écouter la radio pour comprendre que personne n’est passé à autre chose. Je ne dis pas que cette décennie est l’unique référence pour nous mais il est indéniable que ces années ont été un tournant majeur pour la musique populaire. Pour Marquis de Sade et Orchestre Rouge, c’est en m’intéressant à Théo Hakola que j’en suis venu à écouter la scène rock rennaise et bordelaise des années 80. Il y a avait du rock qui sonnait très anglais avec des paroles en français, j’étais comblé.

Votre marque de fabrique semble reposer sur votre chant en français et la qualité poétique des textes. Le choix de cette écriture s’est fait naturellement, depuis les débuts ?
Pour ma part, il y a l’envie d’écrire avec en parallèle l’envie de chanter. Même si j’écris dans ma langue maternelle – car c’est encore avec elle que je suis le plus libre – j’essaie de faire sonner la langue comme une langue étrangère. L’écriture est un rapport au son avant d’être un rapport au sens. Le son guide le sens, le sens mène à l’émotion. Il en va de même pour la musique. Nous voulons que nos chansons soient écoutées dans leur entièreté, que la musique soit l’égal du texte et vice versa et que la première attention soit portée sur le son et l’effet produit. Les mots et la musique sont là pour évoquer un tas de choses à la première écoute. Le sens du texte et la structure de la chanson doivent venir dans un second temps.

Vous citez régulièrement des écrivains dans vos biographies ou interviewes. Leurs écrits ont influencé tes chansons tout autant que la musique que tu as pu écouter ?
Tous les matériaux sont utiles à la composition. La lecture, le cinéma, la musique et la mode sont autant de domaines qui nous prennent par la main et nous emmènent dans des contrées que l’on ne soupçonnait pas. Tout cela résonne en nous et nous emporte vers nos propres chansons.

Tu cites également la scène mancunienne, Ce sont des fondements de ton éducation musicale ?
Manchester évoque une certaine idée de la musique pop. L’urgence juvénile. Je pense forcément à Wu Lyf et Money qui sont deux groupes qui m’ont beaucoup marqué.

Longtemps le rock en français se devait contestataire afin de marquer son opposition à la chanson française. Est-ce que tu as le sentiment que des artistes comme Dominique A ou Miossec ont permis de donner des lettres de noblesse à la chanson et ainsi la décomplexer, et donc vous ouvrir des portes et vous servir aujourd’hui ?
Je ne crois pas que le rock français était contestataire pour marquer son opposition à la chanson française. Pour ce qui est de Dominique A, oui, je crois qu’il a insufflé une certaine liberté à travers son minimalisme inspiré. Je crois que grâce à Dominique A, des groupes comme François and the Atlas Mountains ou Mansfield Tya ont pu voir le jour. Je crois qu’aujourd’hui on se doit de ne plus choisir entre rock et chanson française. L’un n’existe plus sans l’autre.

Peut-on dire que votre sélection en finale de la très médiatique finale Sosh-Les Inrocks Lab fut la première véritable marche de votre carrière, un véritable tremplin ?
Je crois que la première marche, s’il doit y en avoir une, est l’enregistrement de notre premier EP «Juste Avant La Ruée». Le groupe s’est formé pendant l’enregistrement. Par la suite, tous les tremplins auxquels nous avons pu participer nous ont aidé à nous faire connaître.

Avez-vous imaginé un instant être « nominables » pour les Victoires de la Musique ?
Oui et non. Bien sûr, on y pense forcément mais on n’imagine pas!

Tout semble, du moins de l’extérieur, aller très vite pour vous… En moins de deux ans un EP encensé, des récompenses comme notamment le Prix du Jury des iNOUïS 2015 à Bourges ou le Coup de Coeur Charles Cros 2015, une signature en maison de disques et maintenant un album… Comment le vis-tu ?
Tout va assez vite mais à la mesure de notre travail. Notre entourage nous suit de près et nous avons la chance d’être soutenus par de nombreux tremplins. Nous travaillons sans cesse la scène et nos morceaux et nous nous concentrons sur la sortie de notre premier album qui sera très certainement l’étape la plus importante de ces trois dernières années. Nous avons hâte, nous sommes prêts. Yeah!

Vous allez entamer à une belle tournée 2016 pour la sortie de l’album, êtes-vous près ? L’avez-vous préparée différemment ?
L’équipe s’est agrandie récemment. Didier Martin nous suivra aux lumières sur toutes nos dates. Nous avons travaillé notre nouveau set avec les titres de l’album pendant une semaine. Nous essayons d’aller de plus en plus à l’essentiel. Nous voulons donner des concerts bruts, sans artifice. Nos chansons, de l’émotion, de la stupeur et c’est tout.

Tu as longtemps travaillé en solo, aujourd’hui vous êtes trois, as-tu changé pour cela ta manière d’opérer, de composer ?
Manu et Colin m’ont appris à assumer ma musique. Ils m’ont ouvert à autre chose.
Cela m’a permis d’élaguer mon écriture et mes compositions. J’ai quasiment tout appris avec eux. Et puis nous composons de plus en plus à trois. Il y a de l’interaction, la composition est donc différente, plus simple et plus compliquée à la fois. Il y a plus de compromis mais plus d’idées aussi!

Des artistes dont tu te sens proches ? Une playlist du moment ? Un morceau fétiche ?
Nous aimons beaucoup Arcade Fire et Nick Cave and the Bad Seeds. Pour ma part, j’écoute en boucle Kevin Morby, Kurt Vile et Marlon Williams ces derniers temps. Il y a chez eux un certain art de la nonchalance qui me touche beaucoup. Pour le morceau fétiche, sans hésitation « Jubilee Street »de Nick Cave…

Comment envisages-tu la suite, les projets et rêves de Radio Elvis ?
On espère un bel accueil du public pour notre album et jouer partout tout le temps! On sera alors comblés…

Propos recueillis par Laurent Charliot

 
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