Nantes passe à l’heure béninoise

Il y a un an, Sami Fatih et Axel Vanlerberghe nous parlait de leur duo récemment créé ainsi que de leur EP Cycle. Leurs expériences internationales ressortaient déjà dans leurs inspirations, cette fois-ci ils vont encore plus loin ! Au cœur du projet « Les Nuits du Bénin » qui se déroulera cette semaine, les deux acolytes nous expliquent pourquoi ils se sont tant investis dans la création de ce festival. Une aventure humaine et musicale.

 

L’an passé, vous nous parliez d’une sortie possible d’un EP pour donner suite à Cycle. Qu’en est-il ?

Depuis que l’on s’est vu, nous avons fait une belle tournée en France et à l’étranger. On a eu la chance de faire une tournée en Indonésie et en Chine l’année dernière, cela nous a permis de finir 2017 en beauté. C’était la première fois que nous nous rendions là-bas, nous avions aucun public dans ces pays. Tout s’est très bien passé, les retours furent excellents.
Concernant le studio, nous n’allons probablement pas sortir d’EP en 2018. Par contre, toute l’année nous allons publier des morceaux accompagnés de clips. Au compte goutte. On commence à penser à notre album sur lequel on travaillera en 2019.

Dans quels lieux avez-vous joué lors de votre tournée asiatique ?

Des festivals essentiellement, on a joué sur la plus grosse scène de notre carrière en Chine. C’était gigantesque, avec des écrans géants ! En Indonésie, c’était des lieux beaucoup plus roots où l’organisation n’était pas optimale mais c’est ce qui est cool aussi. On a ambiancé un défilé de mode dans un hôtel de luxe aussi. L’un de nos concerts s’est déroulé à deux mètres de la scène. On a fait de tout. (rires)
Côté frenchies, on a croisé Vaudou Game, Asian Dub Foundation, Sax Machine & Matmatah !

En juillet dernier, vous rencontriez Jean-Michel Jarre au Festival de Poupet.

Oui effectivement, on a échangé plutôt brièvement mais on a quand même eu le temps de prendre une photo. Son équipe était également très cool, techniquement c’est tout simplement énorme.

A côté de ça, vous avez faits plusieurs aller-retours en Afrique. Parlez nous de cette expérience.

On a été pour la 6ème fois au Bénin, on commence à y être à l’aise. Nous y avons notre logement, notre moto, nos potes, nos petites habitudes, c’est super cool. En fait, on est autonome désormais, on y va entre une semaine et 10 jours. On a mieux compris leur rythme de vie et comment tout cela fonctionne. Pour l’anecdote, nous sommes tombés en panne de moto 4 fois la dernière que nous y sommes allés mais ça n’a jamais été un très gros problème. En moins d’une heure, tout est résolu. Tu fais 20 mètres et un mec te répare ça rapidement. Rien à voir avec la France.

Vous êtes particulièrement investis dans le festival Les Nuits du Bénin. Comment s’est monté ce projet ?

Tout est venu de notre rencontre avec Jérôme Ettinger il y a 3 ans. On le connaissait un peu avant mais nous avons collaborer concrètement avec lui en 2015. Il avait déjà monté un projet en Égypte et avait l’envie de faire la même chose au Bénin. Il nous a embarqué avec lui, nous n’avions pas d’idée claire sur le projet. On est allé s’imprégner de la culture lors du premier voyage. On rencontrait des musiciens, on enregistrait et filmait des choses. Nous ne savions pas ce qu’on allait faire de toute cette matière. Tout s’est éclairer lors du deuxième voyage où nous avons de nouveau bossé avec les béninois rencontrés lors du premier voyage. Depuis, on a intensifié notre travail avec deux rappeurs qui forment D-Flex. C’est avec eux qu’on présentera la création Agô le 7 avril au Ferrailleur. Cette création reprend également des éléments qu’on a accumulé lors de nos passages en Afrique. L’idée était de faire un remix audio et vidéo de tout ça.

Nuits du Bénin

A quoi ressemble la musique béninoise ?

Il y a plusieurs styles musicaux, le patrimoine musical du pays est très riche. Cela va des chorales aux fanfares. La musique traditionnelle béninoise a longtemps été inspirée de l’époque de l’esclavage, beaucoup de musiques y ont trouvé leur source. Le gospel était très présent durant cette période, il est issu de cette région du monde en fait. Le blues, le jazz et même la salsa sont partis de cette base. Il y a un gros mélange de style qui a évolué avec les décennies.
Pour revenir à D-Flex, le hip hop n’est pas la scène la plus importante du pays mais elle se développe. Les gars s’inspirent beaucoup des groupes de hip hop de l’Afrique de l’Ouest (Nigeria, Ghana …) qui inondent le marché musical africain. C’est ce que t’entends dans beaucoup de bars.

Cela n’a t-il pas été trop dur de lier toutes ces influences à votre musique ?

Tout s’est fait assez facilement, les gars sont très ouverts. Ils sont friands de musique électronique, ça « tape » un peu plus et ce n’est pas très écouté en Afrique de l’Ouest.

Comment avez-vous créer vos premières collaborations sur place ?

On avait un contact de base au Bénin, il connaissait de nombreux musiciens. Il nous a fait rencontrer plein de monde. Le français est la langue qui lie les 200 autres présentes dans le pays. (rires) Ça a facilité les premiers échanges. Après tout s’est créé naturellement notamment avec D-Flex qui sont dans nos âges, le feeling est passé direct. On est bien content de les accueillir à Nantes.

En arrivant au Bénin, qu’est-ce qui a vous a surpris le plus ?

C’est un peu comme au Burkina Faso, tout est possible ! Il y a un sens de la débrouille énorme, c’est un peu cliché de dire ça d’ailleurs. Ils sont optimistes. Pour revenir aux gars de D-Flex par exemple, ils organisent des Tour pour les touristes, ils ont une exploitation agricole bio et ils font de la musique. Chose impensable chez nous. C’est vraiment stimulant !

Quels autres pays africains avez-vous fréquenté ?

Comme on le disait, le Burkina Faso. On a aussi été au Maroc tourné un clip il y a quelques années et en Égypte.

Entre le Burkina Faso et le Bénin, avez-vous trouvé une différence de mentalité ?

Non, pas vraiment. Humainement, c’est un peu la même chose.
Après au Bénin, il y a une culture vaudou très développée. Ça n’a rien à voir avec les poupées et les aiguilles qui est d’ailleurs plus proche du vaudou haïtien. Au Bénin, c’est un code de conduite, c’est très respecté. Cela est proche du karma si l’on peut dire. Il réunit toutes les religions. C’est au-dessus.

A quoi les nantais peuvent s’attendre sur cette première édition ?

Musicalement, c’est très varié. C’est un panel de tout ce qu’il peut se faire au Bénin. Le 5 avril à la salle Paul Fort, le Bénin International Musical ouvrira le festival. C’est un groupe créé par Jérôme Ettinger, tous sont béninois mais Jérôme les a aidé sur les arrangements notamment. Ils ont une énergie de ouf ! C’est vraiment à voir. Il y aura aussi le vernissage de l’expo au Pannonica.
Pour la création, le nom « Agô » correspond aux fêtes traditionnelles. On voulait retransmettre l’énergie de ces fêtes là en live. Là-bas, un groupe peut jouer pendant 8 à 9 heures sans s’arrêter. C’est impressionnant. Ce côté trans’ est très présent dans la musique béninoise et on va essayer de le retranscrire dans cette création.

 

Les Nuits du Bénin
Du 5 au 8 avril à Nantes

Propos recueillis par Alban Chainon-Crossouard